Après deux jours, nous avons dû changer de logement car l’hostal Candelaria était complet pour les jours suivants. Nous sommes allés à l’hostal La Rose de l’Atacama qui est tenu par deux français. Marie et son associé Aurélien nous ont très bien reçu et c’était un plaisir de partager quelques jours dans cette bonne ambiance qu’ils ont créée. Ils sont là depuis deux ans maintenant et je souhaite longue vie à leur hostal.
En fait nous étions venus dans cet établissement sur le conseil de Baptiste qui nous avait dit de prendre contact avec Santiago, un guide local. Nous avons appris plus tard que ce dernier vivait maintenant avec Marie. Vous verrez que nous avons créé des liens avec ses deux personnes car le courant passait bien, j’espère que nous garderons ce contact et qu’un jour nous nous reverrons.
Nous avons donc pris Santiago comme guide pour une des plus belles sorties de cette région, le Salar de Tara mais je ne peux pas commencer sans vous parler de ce guide pas comme les autres.
Si dans San Pedro vous croisez un jour un chapeau noir, il y a de grandes chances que dessous il y est Santiago. Sous ce chapeau, vous découvrirez si vous prenez le temps,un personnage avec une histoire peu commune et aussi une personnalité, moitié poète, moitié rebelle.
Santiago parle le français à la perfection, avec une élocution et un phrasé très particulier. Il emploit les bons mots et parle distinctement. Son histoire est directement liée à celle de son pays et quand il nous la raconte il y a de l’émotion. 1973, le général Pinochet arrive au pouvoir, les intellectuels sont faits prisonniers et pour échapper à cela nombreux sont ceux qui fuient le pays. 5000 d’entre eux sont réfugiés politiques en France. Le père de Santiago, Guillermo Atias, était le président des écrivains chiliens, il a lui-même écrit et publié et il était un de ces réfugiés chiliens avec toute sa famille. Santiago avait 6 ans et est resté en France une vingtaine d’années. La France quand il en parle, vous en avait la chair de poule car il lui est très reconnaissant. Après comme je vous ai dit, il est un peu rebelle et il est épris de liberté, il n’est pas d’accord avec tout, même si c’est son pays d’accueil. Il serait trop long ici de vous raconter dans le détail ce parcours mais je peux vous dire que je ne pense pas oublier Santiago,ici devant une lagune. Il y a des gens comme ça avec qui j’ai une sorte d’affectif et il fait parti de cela. Il doit écrire son histoire, il me l’a dit, j’espère qu’un jour je l’aurais dans les mains.
Nous sommes partis en altitude avec notre guide, j’avais pris des feuilles de coca avant de monter et aussi pendant toute la journée je mâchouillais ces dernières. C’est à partir de ces feuilles que l’on extrait la cocaïne mais c’est une tradition plus que millénaire pour les peuples de ces pays Andins qui doivent vivre et fournir des efforts en altitude. La mastication aide à respirer et aussi favorise la circulation de sang, elle augmente les globules rouges et permet de faire des efforts et de lutter contre la fatigue. Pour ma part cela m’a fait du bien et je continuerais d’en prendre tant que nous serons au dessus 3000 mètres.
Nous voilà parti pour les hauteurs, nous voulions aller sur le toit du monde et bien en route…
Le GPS affichait 4827 mètres, nous étions bien sur le toit du monde, pas vraiment en haut mais quand même au dessus du Mont Blanc. Nous ne sommes pas malade et c’est une belle révélation pour nous, cela veut dire que nous avons notre passeport pour l’altitude et que nous pourrons aller en Bolivie, c'est-à-dire au-delà 5000 mètres.
Alors bien entendu il ne faut pas faire n’importe quoi à ces altitudes, pas de gestes brusques n’y d’effort, marcher lentement et ne pas s’empresser, sans quoi nous sommes vite rappelé à l’ordre. La tète se met à tourner et l’on peut perdre connaissance.
Tout au long du trajet Santiago nous a expliqué la vie dans ces contrées d’altitude, la vie des atacamiens, de la faune et de la flore. Plus nous montions et plus la végétation se faisait rare jusqu’à pratiquement disparaitre au-delà 4500 mètre. C’est pourtant à ces hauteurs que vivent les vicuña (se prononce vicugna),
quelques oiseaux comme la mouette des Andes et aussi le renard du désert. Les vicuña sont un peu entre le chameau et le lama, je les trouve plus élégant que ces derniers. Ils sont plus fins et leur allure pour se déplacer est plus harmonieuse. Ils sont maintenant protégés car leurs fourrure est de qualité supérieure à celle des lamas et ils étaient attrapés pour cela. Seulement un vicuña sans sa laine est comme un hérisson sans ses pics, le premier est vulnérable au froid et le second aux prédateurs.
Ce qui est impressionnant sur le toit du monde, c’est qu’il est très vaste, l’altiplano est une grande étendu à plus de 4000 mètres ou il y a des lagunes, des formations rocheuses
, de grandes étendues désertiques, c’est l’immensité.
De cette dernière émergent tous les volcans de la cordillère, ici le maitre est le Licancabur, 5916 mètres. On le voit de partout, il est sur tous les panoramas, majestueux il est sur deux pays, le Chili et la Bolivie. Nous avons roulé dans cette immensité et je dois bien dire qu’il faut vraiment du métier pour ce déplacer dans ces montagnes , bravo à notre conducteur, il naviguait à vue et ce n’était pas facile. Souvent il devait s’arrêter, mettre le 4X4 face au vent et attendre un peu que le moteur refroidisse.
Coté paysages c’est grandiose, entre les colonnes de pierres,
les moais de Tara
,vous pouvez voir notre guide au pied de cette formation et de là mesurer sa hauteur.Les lagunes aux couleurs changeantes
et ce salar de Tara, tout ici nous
ramène à la petitesse de l’homme devant la nature,
du moins c’est ce que j’ai ressenti. Ce qui m’a également marqué, c’est la virginité des paysages, ils ne sont pas souillés par les hommes car peu de monde vient sur ces flancs de volcans et encore moins sur ces lagunes colorées. La nature est là devant moi et elle est belle, très belle,
hostile à l’humain c’est vrai mais tellement pure.
Nous sommes redescendus à San Pedro après une journée chargée en émotions et en interrogations tellement nous étions loin de notre quotidien.
Cette journée est inscrite dans ma mémoire, elle est celle de la rencontre d’un homme et aussi celle de la découverte des merveilles de notre planète. Pour moi qui ai la chance d’être un contemplatif je ne peut qu’être heureux de cette sortie sur les hauteurs Andines.
Bientôt nous quitterons le Chili du nord pour la Bolivie, peut être que nous reviendrons dans ce pays du coté de la Patagonie, je ne sais pas trop car le programme n’est plus établis. C’est au jour le jour, seul impératif, le 20 février à Ushuaia , un avion qui nous ramènera vers l’Europe via Buenos Aires mais nous ne voulons pas y penser encore.