Comme à chaque voyage, nous écrivons nos impressions chacun de notre coté sans concertation.
A la fin des images de notre voyage en noir et blanc,comme du temps où Cuba s'est arrêté...
Impressions finales Anita
Pascal a eu la bonne idée de commencer par le sud et de remonter vers la capitale, au lieu de commencer par la Havane. Comme cela nous avons pu prendre la température du pays tout doucement et s’habituer aux us et coutumes. Ça commençait plutôt bien dans le sud, malgré le mauvais temps et le fait que je me suis blessée. C’est là que nous avons eu la meilleure « casa » et la meilleure nourriture, même si tout manquait dans les magasins. C’est la première fois depuis que l’on voyage que nous ressentons ce manque de tout. C’était apparemment comme cela dans l’Europe de l’Est il y a quelques années, mais nous n’y sommes jamais allés. Des magasins plein de vide. Ou bien des rayons plein du même produit. On ne peut pas rentrer comme on veut. Il faut faire la queue partout et pour tout (poste, banque, internet, etc..). Il y a toujours un vigile à la porte et on entre par un ou deux à la fois. Quelqu’un qui sort, quelqu’un qui entre. Ça fait 56 ans que les gens passent leur temps à attendre. Ils sont étonnamment calmes et résignés. On demande «el ultimo !», la fin de la queue et on attend son tour.
A la Havane on trouve des gens pauvres qui font la queue pour vous. (Il y a des rabatteurs qui peuvent arranger cela). Nous avons fait la queue comme tout le monde. On apprend à être patient. La propagande est omniprésente, et le Ché est partout et vénéré comme le Bon Dieu. Quand même on se demande comment cela se fait que les gens acceptent tout et pourquoi il n’y a pas de rébellion. Le peuple a fait la révolution avec Castro et à ce moment le monde et le peuple cubain était avec lui. Il a fait de bonnes choses, les campagnes d’alphabétisation ont été un succès. L’éducation et la santé sont toujours gratuites. Mais 50 ans d’embargo ont mis le pays à genoux. On peut avoir un certain respect pour le fait qu’ils ont tenu tête contre la puissance Américaine, mais l’ouverture est en marche et l’Amérique reviendra, alors tout ça pour ça ? Pour commencer il va y avoir trois vols réguliers de la Chine vers Cuba, à partir de janvier, c’était annoncé à la télé locale. C’est la première fois qu’on voit un pays qui produit si peu de déchets, tout simplement parce qu’il n’y rien à jeter. Et puis on ne se sent jamais en insécurité. Mais beaucoup de choses nous échappent bien sûr. D’abord on ne parle pas assez bien espagnol et en plus les gens ne se livrent pas, parce que ce n’est quand même pas un pays de libre expression. Quand même il semblerait que la génération qui a fait la révolution avec Fidel et le Che y croit toujours. Pour les jeunes c’est peut-être différent. Internet arrive malgré (ou grâce) au monopole d’Etecsa (le Télécom national) et l’accès au wifi a le même effet que partout, tous les soirs, les parcs qui donnent accès au wifi sont plein de monde, toute génération confondue, branché et skypant avec leur famille à l’étranger. Le monde rentre à Cuba à travers Internet et les Cubains veulent en faire pleinement partis. On le leur souhaite, mais quand même j’espère qu’ils garderont leur dignité face au monde de la consommation qui arrive. C’est un peuple intéressant, instruit, cultivé avec plein de ressources. On a fait un très beau voyage.
Impressions finales Pascal
Cuba n’est ressemblant a aucun autre pays que nous avons visité jusque là.
Pour commencer je voudrais saluer sa population qui est très accueillante et qui reste digne et patiente malgré des conditions de vie pas toujours et même pas souvent faciles.
Pour voyager en routard comme nous faisons, ce pays n’est pas simple. Les déplacements sont souvent compliqués ou chers et c’est d’ailleurs la raison pour laquelle les cubains ne connaissent pas leur île. Malgré ce petit handicap, Cuba est un pays intéressant par son passé et son histoire hors du commun.
Un pays qui fait la révolution et qui subit derrière un blocus économique de plus de cinquante ans ! Et pourtant il est toujours là debout, affaibli mais debout. Les gens manquent de tout, surtout en dehors de La Havane, mais se débrouillent. J’avais choisi de commencer par la partie la plus à l’Est et la plus sauvage et je ne regrette pas ce choix. Baracoa et les autres villes faites en remontant nous ont permis de nous acclimater à cette vie cubaine. Vie faite de beaucoup de manque mais aussi de joie de vivre qui se traduit par une musique colorée, des danses rythmées et endiablées et une spontanéité dès que quelques notes retentissent. Ce n’est pas du folklore, c’est un besoin vital de bouger sur un air de musique. Face à la difficulté le peuple s’évade par le rythme qui lui est salutaire.
La révolution, le peuple l’a voulu pour sortir de la dictature de Batista qui était corrompu par l’Amérique. Ses héros sont Fidel Castro et le « Che » Guevara dans les plus médiatisés mais il y a en bien d’autres. Cela a donné de la légitimité à ces représentants de la Révolution et chefs de la guérilla. Après les dérives et les choix politiques, renforcés par le boycotte économique n’ont fait que paralyser un pays déjà bien affaibli. Les personnes rencontrées dans notre voyage ne veulent pas parler de la situation économique et politique et j’ai respecté ce choix. Je suis un peu frustré car je ne comprends pas tout. J’ai plein de questions dans ma tète qui restent sans réponse. « Les trois bonnes réformes qu’à amené la révolution sont : l’éducation gratuite pour tous, les soins gratuits pour tous et la fierté nationale retrouvée. Les trois problèmes que la révolution a amenés sont : le petit déjeuner, le déjeuner et le diner! », no comment!
Loger chez l’habitant pendant un mois nous a permis de partager le quotidien. Je suis bien conscient que les gens qui nous logent sont déjà des privilégiés du système car on les paye en Cuc et même si l’état les prélève sévèrement, ils ont quand même un niveau de vie supérieur à la moyenne.
J’ai surtout été surpris par l’architecture des villes et il est certain qu’à une époque éloignée il y a eu des heures de gloire. Mais cela devait servir qu’une petite partie de la société.
Cuba est le pays où le temps c’est arrêté quand j’avais deux ans, cela me fait drôle quand je fais ce rapprochement et pourtant c’est bien vrai ! Vous voulez savoir mon âge ? Remontez à la révolution et vous le saurez. Entendre le bruit des sabots au réveil dans Trinidad, écouter les vendeurs ambulants crier « pan » à 5h du matin, regarder passer les vielles voitures qui cohabitent avec les bici-taxis et les voitures à cheval, observer les étals avec des ustensiles d’autrefois, tout ceci nous fait remonter le temps.
Ici rien n’est facile mais tout est possible se plaisent à dire les cubains. C’est vrai que rien n’est facile et il a fallu patience et résignation pour retirer de l’argent, acheter un peu d’eau minérale et aussi publier des articles sur le blog…
La Havane à parachevé ce voyage et je suis tombé sous le charme. Je n’aime pas quand tout est trop ordonné et qu’il n’y a pas de place pour l’imprévu et la surprise. Là j’étais servi !
Voyager en routard et marcher beaucoup est vraiment le meilleur moyen de rencontrer les gens dans leur vie de tous les jours. Nous avons eu de bons moments et ne nous sommes jamais sentis en insécurité, même dans de petites ruelles de nuit.
Nous n’avons pas parlé du rhum, des cigares et des plages paradisiaques mais tout cela est dans les livres de tourisme.
Nous étions en hiver, il faisait chaud, 28° en moyenne, nous avons eu quelques jours de pluie, à Baracoa en début de voyage, mais le climat était très bien. A l’inverse, en été, il parait que c’est insoutenable, il pleut beaucoup sous des températures de 40°, voir plus.
Les années à venir vont être un tournant important pour le pays. 2018 sera surement la fin d’un règne, une page se tournera. Certains pays gravitent autour de Cuba pour un jour y investir. C’est le cas des USA qui prônent une ouverture. Les cubains de Miami auront surement une influence. Il y a aussi la Chine qui a annoncé 3 vols réguliers par semaine à compté de janvier 2016. Le risque est aussi de voir l’ami fidèle et aussi de Fidèle, le Venezuela, se désengager de l’aide apportée à Cuba. Les récentes élections dans ce pays ne laissent présager rien de bon. Le pays connaitra-t-il encore longtemps la privation et le manque ? C’est l’avenir qui le dira.
Je souhaite que les deux générations qui ont connues la révolution et le blocus finissent plus paisiblement leurs parcours et que les générations futures aient un avenir meilleur.